Der Tod in Venedig (Thomas Mann)

De BoyWiki
Révision datée du 4 juillet 2012 à 22:00 par Aetos (discussion | contributions) (m)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir La mort à Venise.

Der Tod in Venedig (La mort à Venise) est le titre d’une longue nouvelle que Thomas Mann publia en 1912. Elle a inspiré un film à Luchino Visconti (1971) et un opéra à Benjamin Britten (1973), ainsi qu’un ballet à John Neumeier (2003).

Une nouvelle autobiographique

Il y a une part autobiographique dans La mort à Venise, ce que Thomas Mann, qui fit un voyage à Venise du 26 mai au 2 juin 1911, reconnaissait volontiers. Il commença dès juillet 1911 la rédaction de la nouvelle, qui fut achevée en juillet 1912.

Le personnage principal est Gustav von Aschenbach, un écrivain munichois reconnu (et anobli) dans la cinquantaine. Troublé par une mystérieuse rencontre lors d’une promenade, il part en voyage sur la côte adriatique et finit par aboutir à Venise, une ville dans laquelle il ne s’est jamais senti à l’aise. À l’hôtel du Lido où il loge, Aschenbach découvre Tadzio, un jeune adolescent polonais qui le fascine par sa beauté. Il n’ose l’aborder, mais le suit dans toute la ville. Puis Aschenbach, en proie à une sombre mélancolie et une sorte de fièvre dionysiaque, succombe à une épidémie de choléra asiatique qui fait rage dans la ville. Il meurt sur la plage en contemplant une dernière fois Tadzio, l’objet de sa fascination.

Admirablement servi par une langue très riche, truffé d’allusions à la Grèce antique et à la mythologie grecque, tout le récit est rythmé par les thèmes de la mort, de l’art et de la nostalgie.

Interview de Thomas Mann

En 1951, Luchino Visconti rencontra Thomas Mann et l’interrogea à propos de sa nouvelle. Voici la réponse de l’écrivain :

« Rien n’est inventé, le voyageur dans le cimetière de Munich, le sombre bateau pour venir de l’Île de Pola, le vieux dandy, le gondolier suspect, Tadzio et sa famille, le départ manqué à cause des bagages égarés, le choléra, l’employé du bureau de voyages qui avoua la vérité, le saltimbanque méchant, que sais-je… Tout était vrai…
L’histoire est essentiellement une histoire de mort, mort considérée comme une force de séduction et d’immortalité, une histoire sur le désir de la mort. Cependant le problème qui m’intéressait surtout était celui de l’ambiguïté de l’artiste, la tragédie de la maîtrise de son Art. La passion comme désordre et dégradation était le vrai sujet de ma fiction.
Ce que je voulais raconter à l’origine n’avait rien d’homosexuel ; c’était l’histoire du dernier amour de Goethe à soixante-dix ans, pour Ulrike von Levetzow, une jeune fille de Marienbad : une histoire méchante, belle, grotesque, dérangeante qui est devenue La mort à Venise. À cela s’est ajoutée l’expérience de ce voyage lyrique et personnel qui m’a décidé à pousser les choses à l’extrême en introduisant le thème de l’amour interdit. Le fait érotique est ici une aventure anti-bourgeoise, à la fois sensuelle et spirituelle.
Stefan George a dit que dans La mort à Venise tout ce qu’il y de plus haut est abaissé à devenir décadent et il a raison. »[1]

L’ombre de Gustav Mahler

On a beaucoup glosé sur le côté musical de La mort à Venise. Pour beaucoup, le portrait de Gustav von Aschenbach serait directement inspiré d’une photo de Gustav Mahler, le chef d’orchestre et compositeur mondialement célèbre, pour lequel Thomas Mann nourrissait une grande admiration. Or l’exigence absolue et très apollinienne qu’avait Gustav Mahler envers son art est bien connue ; tout comme le héros de la nouvelle. De plus, Mahler est mort le 18 mai 1911, une semaine seulement avant le voyage de Mann à Venise. Cette mort l’avait beaucoup touché, et le prénom commun signerait la ressemblance.

On a risqué aussi un rapprochement du nom “Aschenbach” avec Bach (ruisseau en allemand, et bien sûr le compositeur) et Asche (cendre).

Adaptations

La nouvelle de Thomas Mann inspira plusieurs autres chefs-d’œuvre :

Les similitudes entre Visconti et Britten sont intéressantes. Tous deux ont une vision très musicale et mélancolique de l’œuvre de Thomas Mann ; ce qui peut être rapproché du fait que le musicien britannique et le cinéaste italien, tous deux homosexuels et déjà âgés, moururent la même année, en 1976, peu de temps après avoir adapté cette œuvre – comme s’ils s’étaient identifiés au héros de la nouvelle.

Le vrai Tadzio

Le vrai Tadzio, celui qui a inspiré l’adolescent de la nouvelle, est un baron polonais, né en 1900 et mort en 1986, qui se nommait Władysław Moes – mais on l’appelait en général par les diminutifs “Adzio” ou “Władzio”. Thomas Mann l’a effectivement rencontré et observé au cours de son séjour à Venise au printemps 1911, comme le rapporte par sa femme Katia dans ses mémoires Thomas Mann : souvenirs à bâtons rompus.[2]

Père de deux enfants (Alexandre, mort à l'adolescence et Marie, devenue Marie Moes-Tarchalski, vivant en France), Władysław Moes a été retrouvé vers 1964 par le traducteur polonais des œuvres de Mann, Andrzej Dołęgowski. Des articles à ce sujet ont été publiés dans la presse allemande en 1965. “Tadzio” a vécu bien plus longtemps que Mann n’avait estimé probable au regard de sa délicatesse. Mann a aussi surestimé son âge, puisque le garçon n’aurait pas eu plus de onze ans au moment de leur rencontre (il est cependant possible que sa date de naissance soit antérieure : un article allemand dit qu’il avait 68 ans en 1965, ce qui lui aurait donné quatorze ans en 1911). Contrairement à une rumeur qui veut qu’il soit enterré auprès de sa femme et de son fils au cimetière de Powązki à Varsovie, Władysław Moes repose seul dans sa propriété familiale de la région de Poznan, à l’ouest du pays.

Dans un essai paru en 2001, The real Tadzio, Gilbert Adair présente ses recherches au sujet du « vrai Tadzio », sa vie au cours du siècle dernier et ses réactions par rapport au fait qu’il ait inspiré une véritable icône de la culture pédérastique.

L’influence dionysiaque

L’influence dionysiaque est palpable dans la nouvelle de Mann. Le héros y est pris d’une véritable fièvre dionysiaque, extasiante, qui va le mener à sa perte. Il rappelle ainsi la parution récente de La naissance de la tragédie de Nietzsche, qui analyse les composantes dionysiaques de la tragédie, opposées à la part apollinienne de l’œuvre.

Voir aussi

Bibliographie

Sources

Articles connexes

Notes et références