François-Marie de Marsy

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François-Marie de Marsy, né le 16 octobre 1710[1] à Paris, où il est mort le 16 décembre 1763, est un prêtre français qui appartint à l’ordre des jésuites avant devenir homme de lettres.

Biographie

Marsy entre au noviciat des jésuites le 13 août 1729. Après avoir prononcé ses vœux, il est successivement professeur de grammaire, d’hu­manités et de rhétorique au collège Louis-le-Grand de Paris.

Il en est renvoyé en novembre 1738[2] pour une affaire de mœurs avec l’un de ses élèves, le petit prince de Guémené[3] âgé de douze ans.[4]

Voltaire évoquera cet épisode dans une lettre de 1765 à D’Alembert (on reproduit également les deux notes de l’édition Lefèvre de 1832) :

« Est-il vrai que le jésuite qui avait enfondré[5] le cul ¹ du prince de Guémenée est mort ? ne s’appelait-il pas Marsy ? On dit que d’ailleurs c’était un garçon de mérite ¹.

¹ Les choses n’allèrent pas tout-à-fait si loin. « Mon ami, dit la princesse à son fils, quelles étrennes faut-il donner à votre préfet ? — Maman, il faut lui donner un pot de chambre. — Que voulez-vous dire ? — Maman, c’est qu’il me pisse sur le dos, et je n’aime point ça. »
Marsy fut chassé des jésuites, et Fréron, son ami intime, sortit avec lui.
(Note posthume de Condorcet.)
¹ Voyez le Dictionnaire philosophique, au mot Jésuites, tome XXX, page 429, et XLIII, 326. Fr.-M. de Marsy, né en 1714, était mort en décembre 1763.
[6]
»

En 1771, dans les Questions sur l’Encyclopédie qui seront intégrées plus tard au Dictionnaire philosophique (chapitre « Jésuites, ou orgueil »), Voltaire rappelle cette affaire en recherchant les causes de la disgrâce des jésuites :

« Ce ne sont pas les fredaines du jésuite Guyot-Desfontaines, ni du jésuite Fréron, ni du révérend P. Marsy, lequel estropia par ses énormes talents un enfant charmant de la première noblesse du royaume.[7] »

Par rapport à la blessure évoquée à deux reprises par Voltaire, la version donnée dans la note de Condorcet s’avère très lénifiante, et finalement assez peu vraisemblable. Quelle est la source de cette conversation alléguée entre le petit prince et sa mère ? On peut supposer que la famille de Rohan-Guémené a souhaité édulcorer les choses, voire innocenter le garçon en le faisant plus niais qu’il n’était en réalité.

Selon l’abbé Le Blanc, Marsy aurait alors refusé de se rendre au collège Henri-IV de La Flèche[8] « où on l’envoyait en punition ».[9]

Il résidera désormais à Paris, rue Vieille du Temple,[10] puis rue Bourg l’Abbé.[11]

Œuvre

Au collège Louis-le-Grand, Marsy s’était fait connaître en 1736 par le poème en vers latins Pictura[12] et par quelques autres pièces du même genre.[13] Contraint de quitter les jésuites à vingt-huit ans, il collabore avec son ami Élie Fréron à l’Histoire de Marie Stuart.[14] Puis il rédige un Dictionnaire abrégé de peinture et d’architecture,[15] avant d’entreprendre une Histoire moderne des Chinois, des Japonnois, des Indiens, des Persans, des Turcs, des Russiens, etc.[16]

Il obtient en 1755 une permission tacite pour l’édition de l’Analyse raisonnée de Bayle, dont les quatre premiers volumes paraissent la même année. Mais comme il s’agit d’un recueil des passages de Pierre Bayle les plus défavorables à la religion, tous les exemplaires sont saisis[17] et Marsy est envoyé pour quelques mois à la Bastille.[18] L’ouvrage est condamné par arrêt du Parlement du 9 avril 1756 : les quatre derniers volumes, dûs à Robinet, ne paraîtront qu’en 1770 en Hollande.

Il est assez piquant que ce jésuite, qui n’a pas fait un seul jour de prison pour ses mœurs, ait finalement été embastillé pour avoir diffusé des écrits contre la religion.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Wikipédia le fait naître en 1714.
  2. Nouvelles de divers endroits, n° 97, 3 décembre 1738.
  3. Jules Hercule Meriadec de Rohan, prince de Guéméné, né le 25 mars 1726 à Paris, mort le 10 décembre 1788 à Carlsbourg.
  4. On trouve parfois mention, à sa place, de son fils Henri Louis Marie de Rohan, qui fut également prince de Guéméné. Celui-ci pourtant, né le 30 août 1745, ne peut avoir été impliqué dans l’incident pédérastique de 1738.
  5. Enfondrer : enfoncer, percer, briser.

    enfondrer (an-fon-dré), v. a. Rompre, briser. Mot vieilli et qui était dans le Dictionnaire de l’Académie de 1696. || S’enfondrer se dit encore en Lorraine pour s’effondrer. (Émile Littré, Dictionnaire de la langue française)

    Voir aussi le Französisches Etymologisches Wörterbuch, t. 3, « fŭndus », p. 875.
  6. Voltaire, « Lettre à M. Dalembert », 16 mars 1765, in Œuvres de Voltaire. T. LXII. Correspondance. T. XII, dir. M. Beuchot, Paris, Lefèvre, 1832, p. 250-251.
  7. Voltaire, Dictionnaire philosophique, Garnier, 1878, chap. « Jésuites, ou orgueil ».
  8. Le collège Henri-IV de La Flèche, à environ 250 kilomètres de Paris, était alors le second établissement jésuite de France en importance et en renommée.
  9. « Lettre à Voltaire », 26 décembre 1738, D1713.
  10. Ars., ms. 10246, f° 7.
  11. Ars., ms. 10302, année 1750.
  12. Pictura : carmen, Paris, Bordelet, 1736 ; trad. française en 1740.
  13. Sabatier, t. II, p. 330 et suiv.
  14. Histoire de Marie Stuart, Londres [Paris], 1742, 3 vol. in-12.
  15. Dictionnaire abrégé de peinture et d’architecture, Paris, 1746, 2 vol. in-12.
  16. Histoire moderne des Chinois, des Japonnois, des Indiens, des Persans, des Turcs, des Russiens, &c. : pour servir de suite à l’Histoire ancienne de M. Rollin, Paris, Desaint et Saillant, 1754-1778, 30 vol. in-12, dont seuls les douze premiers volumes sont de lui, l’ouvrage ayant été terminé par Adrien Richer.
  17. J.-P. Belin, Le mouvement philosophique de 1748 à 1789, Paris, Belin, 1913, p. 71-73.
  18. Rétat, p. 304-305.