« Lorsque l’enfant paraît - Les homosexuels puritains » : différence entre les versions

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que du jour où vous pourrez les brailler aux hommes libres de vivre que nous ne sommes pas
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aujourd&rsquo;hui. Pour l&rsquo;instant, les flics nous suffisent.</p>
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    <p>Conclusion&nbsp;: pourquoi les m&egrave;res et les homos vertueux (chassez les grenouilles des b&eacute;nitiers,
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<p>Conclusion&nbsp;: pourquoi les m&egrave;res et les homos vertueux (chassez les grenouilles des b&eacute;nitiers,
elles reviennent par les pissoti&egrave;res) s&rsquo;en prennent &agrave; la p&eacute;do/p&eacute;d&eacute;rastie &nbsp;? Nos lois, notre police,
elles reviennent par les pissoti&egrave;res) s&rsquo;en prennent &agrave; la p&eacute;do/p&eacute;d&eacute;rastie &nbsp;? Nos lois, notre police,
nos familles ne leur suffisent pas&nbsp;? Nous crevons d&rsquo;&ecirc;tre ce que nous sommes, et ils nous pr&ecirc;chent
nos familles ne leur suffisent pas&nbsp;? Nous crevons d&rsquo;&ecirc;tre ce que nous sommes, et ils nous pr&ecirc;chent

Version du 4 mars 2016 à 14:09

Texte précédent : Lorsque l'enfant paraît - La mère et le pédophile

Article paru dans Libération nº 1902 des 29 et 30 mars 1980.



Quant aux dames Benoit Lapouge et Pinard-Legry, leur réquisitoire contre les pédérastes/pédophiles est très différent ; car ces procureurs-là n’ont pas fait d’enfants : ce sont des homosexuels. Ils vous avouent même, au passage, qu’ils ont eu beaucoup de mal à « assumer » leur homosexualité. Mais, enfin, ils ont atteint trente ans, et ils ont choisi de liquider leur mauvaise conscience en s’en prenant aux pédérastes.

Vieille méthode, que ces messieurs ont rafraîchie à leur façon. Leur livre est triste, il évoque un laborieux mémoire de maîtrise ès-lettres, mauvais français et fautes d’orthographe y compris. La cuistrerie analphabète ne date pas d’hier : mais elle est quand même pénible quand elle s’en prend aux thèmes de pensée les plus douloureux, les moins compris de ce temps.

Mais pourquoi ces homos anti-homos (qui semblent désapprouver la sodomie, peut-être même l’orgasme, voire l’érection, voire le désir, voire l’immoralité absolue de tout vécu personnel) se sont-ils intéressés à la pédérastie, dont ils ne savent rien ? Question stupide. Invertis à longue figure, qui vous inspirent des idées noires pleines de bouffées de morgue et de moisi dès que vous écoutez leur jolie morale, ils n’avaient qu’un souci, très original : protéger l’enfant. Selon eux, le pédéraste/pédophile, loin d’être un libérateur de l’Enfance, est un tyran pour qui le gosse n’est qu’un objet. L’enfant, disent-ils, doit être libre : et abrité de toute influence des adultes. L’enfant se créera tout seul.

Ah mais. Dès qu’un enfant et un adulte se croisent, il y a contamination  : l’adulte (et spécialement le pédo) est une pollution, une nuisance qui va détruite les sublimes virtualités de l’« Enfant ». Passionnante conviction. Elle me fait penser à l’histoire bête de ce couple qui adopte un bébé chinois, et qui se met à apprendre la langue chinoise : pourquoi ? Mais pour comprendre ce que dira ce bébé chinois quand il commencera à parler. Cette manière d’être à l’écoute de l’«  Enfant » comme s’il détenait l’Homme idéal en lui — un Homme qui se manifestera et régnera dès que les hommes d’avant renonceront à lui imposer leur sinistre humanité — me semble bien candide. Spécialement si je pense qu’elle n’est, en fait, que l’alibi d’une éducation, d’une pédagogie aseptique, où tout ce qui peut « toucher » l’enfant est mal, mais où, pour être « neutre », on pratique les valeurs moyennes du petit-bourgeoisisme coincé. L’idéal pédagogique de nos Pinard-Lapouge, c’est le tiroir de morgue. Et l’ennemi, le microbe, c’est (quelle découverte !) le pédéraste. Il va séduire l’enfant. Il va l’influencer. Il va orienter (fâcheusement) sa sexualité. Il — mais que ne va-t-il pas faire ?…

Quand on lit ces « dénonciations », on à l’impression que Pinard-Lapouge pensent que toutes les familles, tous les instituteurs, tous les professeurs, tous les flics, tous les psychotrucs et les psychose-machins sont des pédérastes : au point qu’on peut lire leur livre avec profit pourvu qu’on remplace systématiquement le mot pédé par le mot parents ou profs ou flics. Et, en somme, nos deux homos anti-homos reprochent aux pédérastes de ne pas valoir mieux que des hétéros courants, mères ou papas. Ce serait seulement ridicule s’il ne s’agissait que de comparer deux destins éventuels des enfants. Puisqu’un enfant est un homme, un être particulier, pour qui imaginer un protocole idéal et général d’existence, de croissance, de formation, de sexualité, de pensée, n’est qu’un système d’élevage fasciste. Tiens, prends ma vertu dans la gueule, c’est pour ton bien ! Et bing !

Mais nos deux auteurs homos vont plus loin. Pour eux, comme pour madame Sebbar, l’ennemi de l’enfant, le tyran, le tortionnaire, l’homme à la bite entre les dents, c’est le pédéraste, pas de danger plus urgent à dénoncer. Pas de pouvoir plus dominant à combattre. Actuellement, ce qui aliène l’Enfance, c’est, sachez-le, les pédophiles. Leur hautain droit de cuissage sévit partout où ça sent le pipi ou le lait. Ils règnent sur l’Éducation Nationale, la Justice, l’Intérieur, les associations de parents d’élèves, les partis politiques  ; ils rédigent les manuels scolaires, ils enseignent le football, la musique, les maths : ils vendent du chewing-gum ; ils prennent la température, infligent des vaccins, font manger de la soupe. Tels des extra-terrestres descendus sur notre belle planète pour la conquérir, ils envahissent tout et décident de tout. La preuve  : ces dames Lapouge-Legry ont réussi à trouver, en France, une demi-douzaine d’auteurs illustres, vendus à millions d’exemplaires, qui consacrent leur œuvre à leur amour des enfants, car messieurs Lapine-Pougris n’ont daigné « étudier » la pédérastie que sur quelques livres consacrés à ce thème, et qui émanent de romanciers, autobiographes, universitaires et philosophes qui n’ont, pour seul point commun, que d’avoir… la même couleur de peau, quelle importance  ? Chacun de nous paye au prix du sang — un sacrifice déchirant de toute vie privée — ce droit de pouvoir parler ; et nous avons ce droit pour le talent dont on nous crédite, et non pour les idées que nous défendons. Alors, rescapés d’une censure qui étrangle toute parole pédophile, nous voici, selon Pinouge-Lagrise, un « matériau » d’où il n’y a plus qu’à tirer des phrases pour démontrer que la pédérastie, c’est mal.

La pédérastie telle que, chacun à notre façon, nous l’avons racontée, pensée, mise en symboles et en images, voire en rêves, dans un monde où ni ces amours, ni l’enfant n’ont aucune place, voilà le matériau sociologique et statistique qui sert à nos constipés pour dire : « Flaubert veut que les épouses soient adultères et se suicident. Toute censure mise à part, est-ce un principe universalisable ? »

Non, certes, Lapine-Pougeard. Ce que nous disons chacun, et qui est aussi différent que nous le sommes, est œuvre de penseurs, de poètes, de romanciers ; et nos livres ne sont pas plus des traités de pédagogie que Roméo et Juliette, ou Tristan et Iseult, ne sont des manuels d’éducation sexuelle. La réalité — contemporaine et française — de la pédérastie n’est pas dans nos livres : elle est dans les prisons. Au lieu de traficoter nos bouquins comme un étudiant fatigué qui salope un mémoire, courez-les, les prisons. La vérité des amateurs d’enfants est un martyrologe. Mais ça ne vous intéresse pas. Vous vous situez « au-delà du juridique ». Vous avez de la chance : pédéraste, je n’ai pas cette candide liberté d’être « au-delà » des tribunaux et des commissariats. Et les étranges leçons de morale aseptique que vous proposez ne cesseront d’être indécentes, imbéciles, poujadistes et vulgaires, que du jour où vous pourrez les brailler aux hommes libres de vivre que nous ne sommes pas aujourd’hui. Pour l’instant, les flics nous suffisent.


Conclusion : pourquoi les mères et les homos vertueux (chassez les grenouilles des bénitiers, elles reviennent par les pissotières) s’en prennent à la pédo/pédérastie  ? Nos lois, notre police, nos familles ne leur suffisent pas ? Nous crevons d’être ce que nous sommes, et ils nous prêchent d’être meilleurs qu’eux ? Donnez-nous donc l’exemple du respect des enfants : et, de ce moment, vous nous admirerez.


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