Quand mourut Jonathan (36)

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L’heure du car avait passé : si Jonathan avait voulu aller à Paris, il aurait dû attendre le lendemain. Mais il n’y pensait déjà plus. La crainte de revoir Serge grandi le retenait. Rester ici, patienter jusqu’à ce qu’on amène l’enfant, était plus sage.

D’ailleurs, qu’aurait-il fait là-bas ? Il y aurait eu les mêmes obstacles qu’auparavant, même si Barbara, préoccupée désormais de mari plutôt que de chiot impubère, en rabattait sur ses droits de maman.

Jonathan n’avait rien reçu d’elle depuis plusieurs mois. Il avait craint que les calomnies parisiennes dont son marchand lui avait fait le récit soient parvenues aux oreilles de la jeune femme. Elle n’avait guère accès au milieu confidentiel où cela prospérait, mais, avec ses amis richissimes…

Il fallait croire qu’elle les avait lassés, ou déçus. Et puisque Simon, de son côté, semblait n’éprouver aucun soupçon, l’affaire de Sade n’avait pas transpiré. Ou encore, le marchand avait exagéré les choses, et décrit la situation en noir afin d’avoir simplement un prétexte pour diminuer les mensualités qu’il versait.

Après l’angoisse que lui inspira l’idée d’un Serge inconnu, Jonathan réussit à se raisonner. Il suffisait de ne rien imaginer, ne rien essayer, ne rien prévoir. Être là, être prêt. L’avenir serait doux, puisqu’il y aurait Simon entre l’enfant et Barbara. Elle n’aimait personne, dans sa folie narcissique de jeter un amour grandiloquent et visqueux à la figure de tout le monde ; il aimait bien les gens, dans sa pauvre cervelle de raté. Ils se neutraliseraient, et la liberté de Serge était là.

À chaque jour qui passerait, Serge serait plus indépendant et plus fort. À chaque jour, si Jonathan en était digne, leur amitié se consoliderait. La vraie vie n’aurait plus d’ombre. Aucun obstacle, en tout cas, que l’on ne puisse mesurer et franchir. Les difficultés ne viendraient plus du dehors. Les malheurs, s’il y en avait, ne regarderaient qu’eux, et seraient à taille humaine. Brouilles, maladies, accidents, caprices, laideurs, divergences, érections fatiguées, discussions aigres, énervements, blessures, temps qui passe : bref, le bonheur tout cru.


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