Sava Petković

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Sava Petković (en cyrillique serbe Сава Петковић) est un jeune apprenti serbe, né vers 1849, qui aurait été tué à Belgrade en 1862 par des soldats ottomans. Il devint par la suite l’un des symboles de l’indépendance de la Serbie.

Son souvenir est évoqué par la statue de bronze intitulée Le garçon à la cruche brisée, un chef-d’œuvre du réalisme serbe,

Un apprenti sellier

Originaire du village de Jajinci proche de Belgrade, le jeune Sava Petković était venu en ville, avec son cousin Milenko Petrović, dans le but d’apprendre le métier de sellier selon les techniques locales de l’artisanat « saratch ». Ce mode de travail du cuir était très prisé, en raison de la beauté et de la qualité des équipements fabriqués pour la chasse et la guerre : housses de fusils, fourreaux, gibecières, etc.

Les émeutes de juin 1862 à Belgrade

L'incident de la fontaine Čukur

Sava Petković blessé à la fontaine Čukur (gravure populaire serbe)

Peu de temps après son arrivée, Sava fut impliqué dans un incident grave, qui se déroula à la fontaine Čukur (Čukur česme) le dimanche 15 juin 1862 (3 juin selon le calendrier julien, alors en vigueur en Serbie).

Malgré la relative autonomie dont jouissait la principauté de Serbie au sein de l’empire ottoman, une garnison militaire turque stationnait encore dans la forteresse de Belgrade. Ce jour-là, entre quatre et six heures de l’après-midi, quelques soldats turcs et des Serbes étaient venus prendre de l’eau à la fontaine, dont le faible débit imposait un certain temps d’attente, rendu pénible par la chaleur.

Il existe différentes versions des événements qui suivirent. Turcs et Serbes se querellèrent pour passer en premier. Il semble qu’un soldat repoussa ou voulut saisir la cruche de Sava, qui protesta. Les Serbes entourèrent alors les soldats turcs et devinrent menaçants. Dans la confusion, volontairement ou non, Sava aurait brisé la cruche d’un soldat, qui se mit en colère et frappa violemment le garçon à la tête avec une cruche, ou le blessa grièvement avec une baïonnette.

Une bagarre générale s’ensuivit, et la police serbe intervint. Le directeur de la police de Belgrade envoya sur les lieux le médiateur Sima Nešić avec plusieurs gendarmes et un traducteur. Nešić se rendit au domicile de Sava Petković, où le garçon avait été transporté.

Aujourd’hui encore, il n’est pas certain que Sava ait succombé à ses blessures. Mais après cette date, plus aucun document qui le mentionne en vie. On peut donc raisonnablement penser qu’il n’a pas survécu.

Extension des combats

Le médiateur, avec l’aide des gendarmes, arrêta les soldats turcs et les emmena vers le siège de la police. En passant par une rue étroite, les Turcs réussirent à s’échapper, tuant Sima Nešić et le gendarme Đorđe Nišlija. Un échange de coups de feu eut lieu avec les policiers serbes, qui tiraient depuis les fenêtres de leur bâtiment, et plusieurs furent blessés.

L’agitation gagna tout le quartier, puis la ville entière. Des tirs furent entendus près des remparts et autour des portes de la ville, qui avaient été fermées par les Turcs. Il y eut en particulier une importante escarmouche sur la place du marché. Des troupes ottomanes arrivèrent pour soutenir les Turcs. Il y eut plusieurs morts de chaque côté, mais le massacre fut évité au terme d’une longue négociation entre les autorités des deux bords.

Le lendemain 4 juin, il y eut une sorte de trêve. Le mardi 5 juin eurent lieu les obsèques solennelles du médiateur Sima Nešić et du lieutenant Ivka Prokić. L’office fut célébré à la cathédrale par le métropolite de Belgrade Mihailo, assisté de nombreux prêtres et avec la participation de l’armée et de la gendarmerie. Mais contre toute attente, les Turcs commencèrent alors à bombarder la ville, détruisant des centaines de maisons et faisant des dizaines de morts et de blessés.

Conséquences politiques

Ces événements eurent des conséquences inattendues sur le destin de la région : on estime en effet que l’incident de la fontaine Čukur et les combats qui suivirent furent à l’origine de la dernière guerre turco-serbe, menant à la libération complète de la Serbie. Cinq ans plus tard, les Turcs furent contraints de quitter les dernières places fortes occupées – Belgrade, Smederevo, Kladovo et Šabac –, prélude à l’indépendance officielle qui fut reconnue en 1878 par les traités de San Stefano et de Berlin.

Le monument commémoratif

La fontaine Čukur aujourd’hui
avec le monument et la sculpture de Simeon Roksandić

La mémoire de Sava Petković fut ranimée grâce à Vanđel Toma,[1] un riche buraliste célibataire de Belgrade qui avait participé à la guerre contre la Turquie. Il laissa par testament une somme de 12 000 dinars destinée à l’érection d’un monument sur le site de la fontaine Čukur – les anciennes installations ayant disparu depuis 1892, suite à la généralisation de l’adduction d’eau dans la ville.

Le premier projet d’une sculpture en bronze sur un piédestal de marbre fut conçu en 1927 par Simeon Roksandić (18741943), l’un des plus célèbres représentants de la sculpture réaliste serbe. Il prit pour modèle un garçon de treize ans, Vlastimir Petković, qui portait le même nom que le jeune héros.

Après quelques modifications réclamées par la municipalité, le monument fut réalisé en 1931, à l’intersection des rues Dobračina et Gospodar-Jevremova de Belgrade, afin de célébrer la mémoire de tous les victimes tombées pour libérer la Serbie de la domination turque. Il se compose d’un bloc de marbre blanc dominant un petit bassin semi-circulaire, et servant de base à la statue de bronze intitulée Le garçon à la cruche brisée (Дечак са разбијеним крчагом = Dečak sa razbijenim krčagom). Cette sculpture représente un garçon de douze-treize ans, nu, gisant sur le dos à côté d’une cruche cassée, par le goulot duquel s’écoule l’eau de la fontaine.

La hauteur totale du monument est de 149 cm, et celle de la statue de 33 cm. L’ensemble est disposé de façon à permettre une observation très rapprochée. L’inscription gravée sur le socle mentionne par erreur la date du 26 mai 1862.

Vandalisme et restauration

La statue fut volée le 21 mai 2010 par des trafiquants de métaux. On la retrouva quelques jours plus tard dans une décharge, brisée en vingt-deux morceaux très abîmés. En outre certaines parties manquaient : un morceau du pied gauche, un autre du ventre, et la signature de la fonderie.

Après restauration, elle fut à nouveau installée sur son socle le 18 avril 2011, et inaugurée le 20. Contrairement à la première installation, elle est maintenant solidement scellée à la pierre.

Le garçon à la cruche brisée (après restauration)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Né en 1830 ou 1834, mort en 1906.