Quand mourut Jonathan (40)

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Jonathan lui servit un nouveau whisky, en faisant remarquer que l’alcool, sur la route…

— Oh, je m’en fous. S’il y a un contrôle, je ferai sauter le pévé, dit négligemment Simon.

L’enfant ne redescendait pas. Ils parlèrent de lui. Simon raconta que, depuis que Serge savait tout sur les hommes et les femmes, il était devenu pudique : il fermait la salle de bains au verrou, même pour se laver les mains. Il avait changé.

— Ah oui, insista Simon, parce qu’avant il te sortait tout ! C’est tous les gosses remarque. Y a un âge où… Et Barbara aussi elle se baladait à poil, on se gênait pas.

— Ah. Oui, c’est bien, dit Jonathan.

— Oui ! Seulement, y avait des petits inconvénients, ajouta Simon en riant. Je te parle, quand il avait six ans, par là, quand j’étais tout le temps chez Barbara. Enfin, presque. Imagine une fois, je prenais ma douche, bon, ce petit con-là il se ramène, gnnn p’pa j’peux rentrer ? Je dis oui, je croyais qu’il veut pisser, et bon : et toc, il me regarde comme ça et puis il m’attrape le machin sans prévenir ! Mais il tire, hein, il tire ! Pire qu’une vraie sonnette !

— Qu’est-ce que tu as fait ?

— Alors là, tu sais, une baffe, mais c’est parti tout seul. Même pas réfléchi. C’est que, la vache, il me faisait mal ! Il s’imaginait pas ! Je te promets il a pas recommencé ! Et puis ça surprend hein, ils sont costauds quand ils s’y mettent. Ça ça surprend.

— Les baffes ?

— Oh les baffes… Après il s’est fait consoler pendant un quart d’heure. Ça a son petit avantage, non.

— Tu l’as pris sous la douche ?

— Non, c’est Barbara qui l’a emmené, bien sûr. De toute façon, à cet âge-là, un homme…

— Bien sûr.

— Non ! Parce que tu comprends, c’est des habitudes aussi, à six ans d’accord. Seulement après ? La liberté c’est bien gentil, seulement si tu vois jusqu’où ça peut aller tu fais quand même un peu gaffe. Sans rigoler. Bon, je te dis pas pour ça, mais enfin, en général. Parce qu’un gosse il comprend pas si tu lui expliques pas. On vit en société bordel, on peut pas toujours tout se permettre.

— Ah oui. Ta façon d’expliquer, dans la salle de bains…

— Mais attends ! Ç’a pas été le plus beau ! Barbara elle était furieuse ! Mais furieuse ! Elle te l’a bichonné pendant une demi-heure. C’est pas bien non plus. Un gosse il chiale tu t’occupes pas de lui, deux minutes après il écrase. Mais si tu fais attention t’es foutu, t’en as pour la soirée. Mais c’est contre moi qu’elle faisait ça.

— Ça arrive, oui, il paraît.

— Ouais. Alors elle me sort : Oui, t’es complètement con, qu’est-ce que t’avais besoin de le taper pour ça, si t’as envie qu’il soit complètement complexé, etc. ! Non eh, tu parles ! Mais c’était ses idées à l’époque. Elle t’aurait dit tout pareil qu’une gifle ça rend pédé ou ça fout le cancer, quand elle s’y mettait… Enfin moi je suis comme toi, je préfère en rigoler. Et puis bon, t’as qu’à voir Serge, dans le genre complexé y a pire ! Ce qu’il y a, c’est qu’il était tellement comédien, tu le prenais au sérieux : en fait t’étais complètement à côté de la plaque. Bon, il te cherchait avec ses singeries, d’accord, mais enfin…

— Sûrement. Enfin, si Barbara le pelotait pour t’attaquer et que toi tu le giflais pour rire, ça a dû lui donner le sens de l’humour.

— Oh, pour rire… T’es un peu comme elle, hein, t’exagères tout. D’abord je l’ai jamais tapé Serge. Qu’est-ce que j’en avais à foutre. Moi le problème, à l’époque, c’est que Barbara j’en étais dingue et elle elle en avait marre. Bon. Voilà. Alors les problèmes, c’était quand même à un autre niveau que le gosse, tu crois pas ? C’est pas que

— Oui, je comprends, coupa Jonathan. Encore un verre ?

— T’as un scotch on croirait pas en pleine campagne, pur malt dis donc, t’as les moyens ! Tu l’achètes loin ?

— Oh non, je buvais trop, c’est fini. Maintenant, j’aime le vin blanc avec beaucoup d’eau.

— Avec de l’eau ? T’es français toi !… Enfin, tout ça ça s’est tassé maintenant. Maintenant Serge est plus trop mioche, Barbara ça va, disons, ça redémarre, je pense qu’après les vacances ça sera au poil : tu vois, c’était pas la peine de tout compliquer, au fond. On va faire les bons petits bourgeois — bon, ris pas ! C’est quand même un peu ça, moi je reconnais ! De toute façon, ça c’est l’extérieur, c’est pas ça qui est important.

— Je suis bien de ton avis, Simon. Mais… vous allez partir deux mois alors ?

— Ah non non ! Un mois ! J’ai qu’un mois, je suis pas artiste, hein ! Non, on part dans un mois, pour un mois.

— Mais, et Serge là-dedans ?

— Ben… Tu m’avais dit que tu étais d’accord, pour deux mois, non ? Bon, ben lui c’est pareil, comme c’est ce qu’il préférait comme vacances, si tout le monde était d’accord, c’était con qu’il reste à la maison. Mais enfin, ne t’inquiète pas hein : tu nous dis ce que ça te coûte, moi je te rembourse, de toute façon. Si tu veux un chèque maintenant, d’ailleurs ? C’est pas qu’on est riches, riches, mais enfin, y a pas de raison que ce soit à ta charge. Non, moi, déjà, ça m’embête pour toi : je te jure, si tu m’avais pas juré que…

— Oui, c’est vrai ! dit Jonathan. J’aime vraiment Serge, et ça me fait du bien. J’ai plutôt peur qu’il s’emmerde, moi.

— Ben ! Depuis le temps qu’il ne me parle que de ça, il l’aura bien cherché, hein ! Non, moi je suis pour, mais — bon, alors je te fais un chèque.

— Non, Simon, ce n’est pas la peine. J’ai tout ce qu’il faut. On verra après. Le principal, c’est que tes vacances avec Barbara ça marche bien. Je trouve… qu’elle a quand même un caractère pas facile.

— Ça oui, reconnut Simon, je sais de qui il tient ça Serge ! Tu sais, au fait, elle était pas tellement chaude pour qu’il vienne ici : ça a été des bagarres, et tout. Ah ouais… Tu sais pas où elle voulait le mettre ? Dans son machin de toqués, là, yoga, carottes râpées, tout ça.

— Hein ?

— J’te l’dis ! Ils font des espèces de stages l’été, dans je sais pas quel château. Tu vois Serge là-dedans !… Non, et puis je sais pas, elle a vaguement l’air d’avoir une dent contre toi, je sais pas ce qui se passe. Remarque, tu l’as un peu snobée, hein, depuis deux ans — et puis moi aussi, au fait !…

— Oui, tu as raison. Mais tu sais, je travaille tellement. Pour moi, aller à Paris, c’est toute une expédition. D’ailleurs, elle ne m’écrit pas.

— Enfin, bon, c’est arrangé. Mais je te dis, elle était pas chaude, chaude. Moi, c’est pas pareil : je trouve que c’est au gosse de décider. Si c’est ça qu’il veut, ben tant mieux. Sauf si ça t’emmerde, toi, bien sûr. Remarque, si tu te fais trop chier, tu le dis franchement : on pourra toujours le reprendre et le mettre un peu chez ma mère ou chez celle à Barbara.

— Non, je crois pas, murmura Jonathan.

— … Et qu’est-ce qu’il fout, lui, là-haut ?


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