« Quand mourut Jonathan (7) » : différence entre les versions

De BoyWiki
(copyright)
Aucun résumé des modifications
Ligne 2 : Ligne 2 :


''[[Quand mourut Jonathan (6)|précédent]]''<br><br>
''[[Quand mourut Jonathan (6)|précédent]]''<br><br>
{{Citation longue|<p>— Où il est ton foutoir ? demanda Serge, bondissant du jardin dans la cuisine. Jonathan,
{{Citation longue|<p>Au matin, Jonathan entendit sa voisine gratter la terre, derrière la clôture qui séparait
installé à la table, composait un dessin aux encres brune et rouge.</p>
leurs jardins. Sans doute elle s’était postée pour découvrir ce qui se passait, et d’où venait
cette voix d’enfant.


— Mon foutoir ?
La matinée était lumineuse. Serge s’était éveillé dès sept heures, ce qui avait un peu
contraint Jonathan. Ils avaient remis leurs vêtements sans se laver. Serge se fit nouer ses
lacets, sous prétexte qu’il ne savait pas. Jonathan ne savait pas non plus. Il remarqua que les
pieds du garçonnet avaient forci ; les orteils étaient moins courts et moins dodus. À
contre-jour, un duvet doré se voyait sur la cheville ; dense, tournant et régulier, il s’usait sur le
mollet sans disparaître.


— Oui ! Là là tu mets les trucs, tu sais tous les trucs.
Serge exigea d’aller tout de suite dans le jardin. Jonathan servit le petit déjeuner par
terre, montait beaucoup d’herbe. Un peu engourdi, l’enfant écoutait les raclements du
sarcloir. Il arracha mollement des herbes autour de lui et les jeta dans son bol, qu’il avait
délaissé à demi plein ; puis il renversa le tout, se releva avec vivacité et s’approcha du
grillage. Il écarta les petites feuilles :


Ah, oui.
Bonjour ! dit-il, apercevant la vieille.


Jonathan se leva. Il dissimula rapidement son dessin. Il ouvrit plusieurs tiroirs du buffet,
— Hnn.
qui était peint en marron veiné pour imiter le bois dont il était construit.


— Ça t’ira ?
Elle resta penchée. Un museau noir, mouillé, environné de poils ras et blanchis,
s’appuya au grillage et toucha les genoux de l’enfant.


Je vais voir.
C’est vot’chien ? demanda Serge, qui passa un doigt pour être léché.


Serge secoua le fouillis de ficelles, d’élastiques, de stylos cassés, de couverts
— Sors de là carogne ! dit la vieille. Elle donna au chien un coup de son outil. Désappointé, Serge revint s’asseoir près de Jonathan.
dépareillés, de bouchons, de vis, et cent autres débris qu’il savait qu’on garde de côté.


— Qu’est-ce que tu voudrais ? demanda Jonathan.
La vieille se redressa et cria à travers la clôture :


Je cherche ! Assois-toi !
J’ai encore des rats ! Mettez du produit ! Monsieur ! Ils m’ont mangé deux poussins
cette nuit ! Et il faut arracher ce liseron-là ! Ça mange mes navets !


Jonathan obéit. L’enfant réunit une collection volumineuse qu’il emporta dans le jardin,
Sans attendre de réponse, elle se courba sur la plate-bande et tapa la terre aussitôt, mais
et il fit plusieurs voyages. Puis il disparut. La porte claqua.
légèrement, avec lenteur, pour écouter. Serge murmura, hilare :


Il n’y avait pas d’enlèvement des ordures au village ; chacun jetait ses détritus dans un
— Tes navets ! mes rats ! mes poussins !
trou qu’il creusait au fond de son jardin, ou derrière. Une sorte de compost criblé de ferraille
et de plastique se constituait ainsi. Chez Jonathan, ce trou, à la lisière d’un champ, était caché
par des bouquets de groseilliers, emmêlés à des bourraches, des carottes sauvages, du cerfeuil
monté en graine, avec les plumes légères et hautes de quelques plants d’asperge délaissés.
C’est là, tapi dans les verdures échevelées et les mauvaises odeurs, que Serge s’était mis à
creuser un bassin, patiemment, à l’aide d’une vieille bêche dont le manche était cassé presque
à ras. Il s’agenouilla d’abord et déracina les herbes une à une en les tirant à grands gestes.
Bientôt il haleta. Quand il eut dégagé un coin de terre, il y dessina un rectangle et commença
de creuser. Il hachait le sol avec un angle du fer de bêche, et il retirait la terre à deux mains.
C’était tendre et gras.


Il rencontra un premier ver de terre, petit, frétillant et très rouge, comme ceux qui
— Là j’ai semé des fleurs d’été, dit Jonathan.
servent à pêcher. Il s’en amusa en le posant sur le dos de sa main. Les soies invisibles lui
grattouillaient la peau, et le lombric éjecta aussi une spire de terre digérée. Alors Serge le jeta.


Il continua de creuser, et il en trouva un second : un gros bout rouge, pointu, qui se
Un très petit rectangle de terre bêchée et tamisée, d’où sortaient des pousses maigres,
balançait à l’entrée d’un tunnel rond et net comme une canalisation. Serge le saisit et tira
hautes comme la main.
vaillamment. C’était élastique, mais mieux que du chewing-gum : ça résistait, c’était musclé.
Et d’une longueur interminable. Curieux et vaguement effrayé, Serge tira un dernier coup et
lâcha aussitôt. Entièrement dégagé, le ver se tordit sur la terre humide.


Dégueulasse ! lui cria Serge.
Des navets ? dit Serge plus fort.


Ce fut l’instant où il rentra à la cuisine pour chercher des trucs.
— Non ce sont des… je sais plus le nom français. Ça pousse dans le blé. Si tu voulais
enlever tes chaussures, ajouta-t-il sérieusement, je voudrais bien dessiner tes pieds.


Entre temps, le ver s’était réenfoui : mais Serge tritura la terre avec une vieille cuiller et
Serge accepta sans s’étonner :
il le retrouva.


Ah ah !… tu vas voir !
Mais je peux pas défaire le nœud.


Il examina les objets qu’il avait rapportés. Essaya quelques machins impossibles à
Jonathan l’aida ; puis, renversé dans l’herbe, jambes en l’air, tirant ses chaussettes,
identifier, hésita, choisit une boîte métallique qui avait contenu un médicament en pastilles.
Serge gloussa :


Attends bouge pas toi hein ?
Ah ! mes poussins ! mes poussins ! mes p’tits rats ! mes navets !


Et, à la cuisine :
Jonathan cala sa planche à dessin sur un cageot ; il donna un illustré au garçonnet et
l’orienta dans la lumière.


Jonathan eh t’as pas du fil de fer ? et t’as pas des allumettes ?
Les deux pieds tu dessines ?


Là, sur le fourneau. Du gros fil ou du petit fil ?
Oui tous les pieds.


Du gros !… Non, du p’tit. C’est comment l’petit ? Tiens, je peux prendre la vieille
Tous mes pieds ?
bougie, là, elle est vieille !


Cette fois, le ver était resté visible.
Serge, qui lisait très mal mais inlassablement, changea souvent de position devant son
illustré. Ses pieds tournaient avec, et Jonathan suivait. Après une heure, il y avait une dizaine
de pieds sur la feuille. Tous ses pieds, pensa Jonathan. Il dessinait au crayon, sans retoucher ni
gommer. Il aurait fait ce travail les yeux clos — c’était de vieille discipline. Mais il était ému
de recomposer le tracé académique aux proportions de Serge. Il produisit le relief par un
simple jeu sur l’épaisseur du trait. La blancheur de la peau lui inspira de laver la feuille, et
cette envie le surprit : depuis qu’il habitait ici, il n’avait plus touché de couleur.


— Attends mon gros attends attends !
Après l’aquarelle, les pieds enfantins eurent l’air remuants et lourds. Là-bas, ceux de
Serge oscillaient doucement tout près d’un bouquet d’orties. Le petit, quelquefois, prononçait
une syllabe en lisant, d’une voix atone ou décidée.


Serge ouvrit la boîte à pastilles et, ramassant le ver au moyen d’un bâtonnet, il l’y
Jonathan contempla la feuille avec bonheur. Ces dessins n’étaient pas de lui. Ce
déposa. La boîte était un peu petite, mais Serge y replia adroitement le lombric et, vite, il
matin-là, simplement, le hasard du soleil et des légers nuages avait fait flotter sur son papier
rabattit le couvercle.
l’empreinte insolente du petit garçon. Il montra l’étude à Serge, qui n’en pensa rien.


La suite exigea des efforts de montage. Serge coupa deux morceaux de fil de fer en les
— C’est comme ça qu’on s’enrhume, dit une voix enrhumée et coupante. La vieille était
tordant longuement pour produire une cassure ; il les serra autour de la boîte puis tortilla les
sortie sur le chemin et, profitant de ce que la façade était nue, elle leur avait jeté un regard
bouts en trop et suspendit la boîte à un bâtonnet.
curieux.


Maintenant m’en faudrait deux comme ça.
Elle s’intéresse à toi, dit Jonathan.


Il se fit un v avec les doigts et étudia cette forme. Il observa les groseilliers, un poirier
Il tira tout à coup Serge par les jambes et lui embrassa longtemps les pieds. Il lécha
en espalier, les brindilles du sol, n’y vit pas ce qu’il voulait, se releva et parcourut le jardin.
aussi entre les orteils. Les petits ongles étaient noirs. L’enfant rit et cria avec satisfaction. Il se
Cela prit un long moment. Il arracha une branchette fourchue à un jeune merisier dont le
débattit. Tombée par terre, la feuille d’étude fut piétinée et crevée. Puis il y eut un temps
tronc, par endroits, portait des larmes de gomme ambrée. Serge en détacha une : c’était mou,
d’arrêt où Jonathan et l’enfant échangèrent silencieusement un regard particulier. Ils se
ça collait bien, il l’appuya un peu partout avant de se la plaquer en verrue nu milieu du front.
relevèrent ensuite et rentrèrent dans la maison.
Il se tâta pour sentir sa nouvelle tête. L’autre fourche fut un morceau de bois mort.


Les fourches plantées dans le trou, Serge y posa comme une broche le bâtonnet auquel
Serge pieds nus avait une attitude dansante et un peu inconsistante, hâtive, tandis qu’il
la boîte était pendue. Il plaça le trognon de bougie juste dessous et s’efforça de l’allumer. La
disparaissait devant Jonathan.}}<br>
mèche était prise dans la stéarine figée, il fallut un travail délicat, et les allumettes n’arrêtaient
pas de s’éteindre.
 
Enfin, une flamme oscillante vint lécher la boîte à pastilles et le ver qu’elle contenait.
Serge, penché dessus, les dents soudain envahies d’une salive acidulée, contempla, écouta,
protégea le feu, écouta encore. Mais aucun bruit ne sortait de la boîte. Sauf, après quelque
temps, des grésillements ; et un peu d’eau coula par la charnière du couvercle. Pas sur la
bougie, heureusement. Le dépôt de noir de fumée qui s’accumulait surprenait Serge. Parfois,
cet enduit se soulevait en copeaux, sous l’action de la peinture qui, dessous, se décollait à la
chaleur ; et le métal apparaissait, noirci aussitôt. Serge ravalait sa salive et son cœur battait
fort.
 
— Ah ahh ! t’es bien cuite maintenant la dégueulasse !
 
Serge souffla la bougie. Il aurait aimé ouvrir la boîte, mais c’était brûlant. Il souffla
dessus aussi, abandonna, se précipita dans la cuisine une fois de plus.
 
— J’prends de l’eau, dit-il.
 
— Il y a le feu ? demanda Jonathan.
 
— Oh non.
 
Il mentit :
 
— C’est pour le bassin. Parce que je fais un bassin. Plein d’eau i m’faut.
 
— Le seau est sous l’évier. Mais cherche le robinet dehors, ce sera plus facile, à côté
d’une fenêtre, très bas.
 
Jonathan, qui avait continué son dessin à la sanguine, l’accentuait maintenant à petites
touches de craie blanche et de fusain.
 
Serge emporta le seau. Il ne s’en servit pas. Il refroidit la boîte directement sous le
robinet. Il put enfin la toucher et la détacher du bâton. Ses doigts se couvrirent de noir. II
détortilla les fils de fer et décoinça le couvercle. Dans la boîte, des résidus tout calcinés, cinq
ou six boudins qui semblaient constitués d’anneaux friables et creux. D’autres cendres avaient
fondu dans l’eau. L’examen de ce cadavre captiva l’enfant encore plus longtemps et plus fort
que l’incinération.
 
Il infligea la même mort à deux limaces géantes, l’une rouge, l’autre grise, tigrée, ou
plutôt marquée de bandes noires de la tête à la queue. La grillade de limace rouge fut un
désastre : ces chairs-là résistent mieux que celles d’un lombric. Quand Serge ouvrit la boîte, la
limace n’était pas calcinée, elle était entière et même encore humide : mais elle avait éclaté et
les boyaux sortaient en une énorme grappe. Serge, écœuré, lança très loin boîte et cadavre.
 
Par précaution, la limace tigrée eut droit à un vrai bûcher de brindilles, que Serge
alimenta soigneusement. Son cercueil à elle, ou son four, était un gros tube à comprimés
effervescents. Le bouchon de plastique prit feu, en dégageant une odeur désagréable et une
fumée filiforme. Puis il sauta. Des liquides et des mousses coulèrent. Longtemps après, les
cendres que vida Serge étaient légères, sonores, granuleuses.
 
— Pourquoi ils sont pas venus les chats ? demanda-t-il à Jonathan. Celui-ci avait désiré
voir le bassin, mais Serge avait refusé :
 
— C’est pas fini. Demain tu le verras. Ça fait rien demain ?
 
— Non, non.
 
Et Jonathan, lui, n’avait pas osé montrer son dessin à Serge : car ce dessin était obscène.
Il représentait l’un de leurs secrets.}}<br>
''{{droite|[[Quand mourut Jonathan (8)|suivant]]}}''
''{{droite|[[Quand mourut Jonathan (8)|suivant]]}}''
<center>[[Quand mourut Jonathan|Retour au sommaire]]</center>
<center>[[Quand mourut Jonathan|Retour au sommaire]]</center>
[[Catégorie:Quand mourut Jonathan]]
[[Catégorie:Quand mourut Jonathan]]

Version du 8 juin 2016 à 18:14

Il est possible que ce document ne soit pas libre de droits …Si vous possédez des droits sur ce document
et si vous pensez qu’ils ne sont pas respectés,
veuillez le faire savoir à la direction de BoyWiki,
qui mettra fin dès que possible à tout abus avéré.

précédent

Au matin, Jonathan entendit sa voisine gratter la terre, derrière la clôture qui séparait leurs jardins. Sans doute elle s’était postée pour découvrir ce qui se passait, et d’où venait cette voix d’enfant. La matinée était lumineuse. Serge s’était éveillé dès sept heures, ce qui avait un peu contraint Jonathan. Ils avaient remis leurs vêtements sans se laver. Serge se fit nouer ses lacets, sous prétexte qu’il ne savait pas. Jonathan ne savait pas non plus. Il remarqua que les pieds du garçonnet avaient forci ; les orteils étaient moins courts et moins dodus. À contre-jour, un duvet doré se voyait sur la cheville ; dense, tournant et régulier, il s’usait sur le mollet sans disparaître. Serge exigea d’aller tout de suite dans le jardin. Jonathan servit le petit déjeuner par terre, où montait beaucoup d’herbe. Un peu engourdi, l’enfant écoutait les raclements du sarcloir. Il arracha mollement des herbes autour de lui et les jeta dans son bol, qu’il avait délaissé à demi plein ; puis il renversa le tout, se releva avec vivacité et s’approcha du grillage. Il écarta les petites feuilles : — Bonjour ! dit-il, apercevant la vieille. — Hnn. Elle resta penchée. Un museau noir, mouillé, environné de poils ras et blanchis, s’appuya au grillage et toucha les genoux de l’enfant. — C’est vot’chien ? demanda Serge, qui passa un doigt pour être léché. — Sors de là carogne ! dit la vieille. Elle donna au chien un coup de son outil. Désappointé, Serge revint s’asseoir près de Jonathan. La vieille se redressa et cria à travers la clôture : — J’ai encore des rats ! Mettez du produit ! Monsieur ! Ils m’ont mangé deux poussins cette nuit ! Et il faut arracher ce liseron-là ! Ça mange mes navets ! Sans attendre de réponse, elle se courba sur la plate-bande et tapa la terre aussitôt, mais légèrement, avec lenteur, pour écouter. Serge murmura, hilare : — Tes navets ! mes rats ! mes poussins ! — Là j’ai semé des fleurs d’été, dit Jonathan. Un très petit rectangle de terre bêchée et tamisée, d’où sortaient des pousses maigres, hautes comme la main. — Des navets ? dit Serge plus fort. — Non ce sont des… je sais plus le nom français. Ça pousse dans le blé. Si tu voulais enlever tes chaussures, ajouta-t-il sérieusement, je voudrais bien dessiner tes pieds. Serge accepta sans s’étonner : — Mais je peux pas défaire le nœud. Jonathan l’aida ; puis, renversé dans l’herbe, jambes en l’air, tirant ses chaussettes, Serge gloussa : — Ah ! mes poussins ! mes poussins ! mes p’tits rats ! mes navets ! Jonathan cala sa planche à dessin sur un cageot ; il donna un illustré au garçonnet et l’orienta dans la lumière. — Les deux pieds tu dessines ? — Oui tous les pieds. — Tous mes pieds ? Serge, qui lisait très mal mais inlassablement, changea souvent de position devant son illustré. Ses pieds tournaient avec, et Jonathan suivait. Après une heure, il y avait une dizaine de pieds sur la feuille. Tous ses pieds, pensa Jonathan. Il dessinait au crayon, sans retoucher ni gommer. Il aurait fait ce travail les yeux clos — c’était de vieille discipline. Mais il était ému de recomposer le tracé académique aux proportions de Serge. Il produisit le relief par un simple jeu sur l’épaisseur du trait. La blancheur de la peau lui inspira de laver la feuille, et cette envie le surprit : depuis qu’il habitait ici, il n’avait plus touché de couleur. Après l’aquarelle, les pieds enfantins eurent l’air remuants et lourds. Là-bas, ceux de Serge oscillaient doucement tout près d’un bouquet d’orties. Le petit, quelquefois, prononçait une syllabe en lisant, d’une voix atone ou décidée. Jonathan contempla la feuille avec bonheur. Ces dessins n’étaient pas de lui. Ce matin-là, simplement, le hasard du soleil et des légers nuages avait fait flotter sur son papier l’empreinte insolente du petit garçon. Il montra l’étude à Serge, qui n’en pensa rien. — C’est comme ça qu’on s’enrhume, dit une voix enrhumée et coupante. La vieille était sortie sur le chemin et, profitant de ce que la façade était nue, elle leur avait jeté un regard curieux. — Elle s’intéresse à toi, dit Jonathan. Il tira tout à coup Serge par les jambes et lui embrassa longtemps les pieds. Il lécha aussi entre les orteils. Les petits ongles étaient noirs. L’enfant rit et cria avec satisfaction. Il se débattit. Tombée par terre, la feuille d’étude fut piétinée et crevée. Puis il y eut un temps d’arrêt où Jonathan et l’enfant échangèrent silencieusement un regard particulier. Ils se relevèrent ensuite et rentrèrent dans la maison. Serge pieds nus avait une attitude dansante et un peu inconsistante, hâtive, tandis qu’il disparaissait devant Jonathan.


Retour au sommaire