François Augiéras

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François Augiéras est un écrivain français, né à Rochester (État de New York, États-Unis) le 18 juillet 1925 et décédé à Périgueux (Dordogne, France) le 13 décembre 1971.

Biographie

Enfance et adolescence

François Augiéras est le fils de Pierre Augiéras, un pianiste français renommé, et d’une mère peintre sur porcelaine d’origine polonaise. Pierre Augiéras, installé aux États-Unis pour raisons professionnelles, meurt d’une appendicite deux mois avant la naissance de son fils. Revenu en France quelques mois après sa naissance, François Augiéras passe son enfance seul avec sa mère. À Paris, qu’il trouve sinistre, il étudie au collège Stanislas. Il vit ensuite à Périgueux, où il s’installe à l’âge de huit ans. À l’âge de treize ans, à la bibliothèque municipale, il découvre André Gide, Nietzsche et Arthur Rimbaud.

Attiré par l’art, il quitte l’école à l’âge de treize ans pour suivre des cours de dessin.[1] En 1941, il s’inscrit dans un des mouvements de jeunesse qui prolifèrent sous le régime de Vichy, mais dès 1942 il s’en détache pour devenir acteur dans un théâtre ambulant.

Voyages

S’engageant en 1944 au dépôt de la flotte à Toulon, il passe en Algérie française où il se retrouve à Alger. Il ne s’y attarde guère, pressé d’aller vers le Sud qu’il pressent être son véritable pays, et où il rejoint son oncle Marcel Augiéras, militaire colonial en retraite, qui vit à El Goléa, dans le Sahara. Durant son séjour dans le Sahara, François Augiéras a des relations sexuelles avec son oncle, découvrant à cette occasion ses propres penchants homosexuels.[1]

Augiéras s’inspire de cet épisode pour écrire en 1949 Le vieillard et l’enfant, qu’il publie à compte d’auteur sous le pseudonyme d’Abdallah Chaamba. L’ouvrage retient l’attention d’André Gide qui, quelques mois avant son décès, rencontre le jeune écrivain après que ce dernier lui a envoyé deux lettres. Augiéras décrit plus tard un Gide manifestement ému par sa rencontre avec lui, et s’imagine comme le dernier amour du grand écrivain. Le vieillard et l’enfant est publié en 1954 par les éditions de Minuit ; une rumeur prétend alors qu’Abdallah Chaamba est un pseudonyme posthume de Gide.[1]

Solitaire et révolté, Augiéras multiplie les voyages, parcourant notamment l’Algérie et la Grèce, et faisant retraite au mont Athos. En 1957-1958, il participe à la revue Structure, que dirige Pierre Renaud à Paris, puis s’engage dans une compagnie de méharistes du Sud algérien. Ses livres s’inspirent de sa vie mouvementée ; lui-même écrit : « J’ai accepté – ou appelé – de dangereuses aventures, toujours avec cette arrière-pensée : ça deviendra des livres ! ».[2] D’un tempérament panthéiste, Augiéras évoque ouvertement dans ses écrits l’attirance sexuelle à la fois pour les garçons et les jeunes filles, mais également pour les animaux.[1] Dans L’apprenti sorcier, le seul de ses ouvrages qui ne soit pas directement autobiographique,[3] il aborde le thème de la pédérastie.

Retour en Périgord

En 1960, il épouse sa cousine Viviane de La Ville, mais leur union ne dure pas et est officiellement dissoute neuf ans plus tard. En 1967, il achève le premier livre qu’il signe de son véritable nom, Une adolescence au temps du Maréchal et de multiples aventures. Les errances, la précarité, l’extrême solitude aggravent son état de santé. Les séjours à l’hôpital de Périgueux se succèdent. À la fin des années 1960, il réside un temps dans les grottes de Domme pour échapper aux conditions de vie dans les hospices, et y écrit sur des cahiers d’écolier. Son livre Domme ou L’essai d’occupation, qu’il ne parvient pas à faire éditer de son vivant, est inspiré de sa vie dans les grottes.[2]

Miné par la pauvreté et la malnutrition, prématurément vieilli par ses conditions de vie, il s’installe dans une maison de repos à Fougères, puis dans un hospice pour indigents à Montignac. Un voyage au Mont Athos est publié en 1970. Usé du cœur, François Augiéras meurt le 13 décembre 1971 à l’hôpital de Périgueux.[4] Il est inhumé à Domme le 18.

Œuvre

L’un des rares amis de François Augiéras, l’instituteur Paul Placet, s’est employé après sa disparition à faire connaître son œuvre, en organisant des expositions de peintures et en diffusant ses manuscrits.[5]

Écrits

L’un de ses biographes, Serge Sanchez, décrit l’œuvre littéraire d’Augiéras comme « une fresque spirituelle qui prend racine dans sa vie même ».[5]

Le vieillard et l’enfant (1954) est un récit semi-onirique, une écriture hantée par Dieu sous le ciel étoilé de l’Afrique : un garçon réduit à « l’esclavage » relate son éducation érotique et spirituelle dans une oasis au milieu du désert. Cette première œuvre a enchanté Gide.

L’apprenti sorcier (1976). Le critique et cinéaste Michel Mardore, avec lequel François Augiéras entretient une amitié et une correspondance sur plusieurs années, pense dès 1964 à adapter ce livre au cinéma. En 1968, il signe un article de critique littéraire dans Le Nouvel Observateur du 6 mars, qui fera connaître l’œuvre d'Augiéras.

Les barbares d’Occident (1990) est un ouvrage autobiographique, comme l’essentiel de l’œuvre d’Augiéras. Il devait à l’origine couvrir l’ensemble de ses rapports avec des figures de son époque (Gide, Cendrars, Jouhandeau, Bissière, Yourcenar, Malraux), mais l’auteur a abandonné son projet initial, préférant inclure dans Une adolescence au temps du Maréchal les épisodes de ses rencontres avec Gide et avec le peintre Roger Bissière.

Plusieurs ouvrages de François Augiéras, dont des recueils de correspondance, ont paru de manière posthume.

Le diable ermite (2002). Au cours des dernières années de sa vie (1968-1971) et jusqu'à la veille de sa mort, lettres d’Augiéras à Jean Chalon, qu’il ne rencontra jamais physiquement.

Dessins et peintures

En plus d’une œuvre littéraire, Augiéras laisse un ensemble de tableaux et des dessins, encore peu connus.

Bibliographie

Œuvres

  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaanba. – [Périgueux] : [Pierre Fanlac], [1949] (imprimé en Belgique). – 76 p. ; 19 × 14 cm.
    225 ex. numérotés. — Récit.
  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaamba. – Version intégrale. – [Périgueux] : [Pierre Fanlac ?], [1950 ?]. – 3 vol. ; 24 × 13 cm (vol. II) ; 19 × 12 cm (vol. III).
    Sous-titre vol. II : La méditation nocturne. Sous-titre vol. III : Un musée au Sahara. Impr. Sur papiers de couleur. — Deuxième édition considérablement augmentée.
  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaanba. – Version intégrale. – [Périgueux] : [Pierre Fanlac], [1950] ([novembre 1950]). – 19 × 15 cm.
    Comporte en épigraphe un extrait d’une lettre d’André Gide.
  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaamba. – Éd. intégrale. – Paris : Éd. de Minuit, 1954 (février 1954). – 272 p. ; 20 × 14 cm.
    Première édition commerciale.
  • Le vieillard et l’enfant : de 1958 / Abdallah Chaanba. – [Périgueux] : [François Augiéras], [1958] (Périgueux : Impr. Fontas). – 80 p. : portr. : 20 × 14 cm.
    Tirage limité à 200 ex. Impr. Sur papiers de couleur. — Texte beaucoup plus court que dans les éditions précédentes. Imprimé par l’auteur à titre privé, sans l’autorisation des Éditions de Minuit.
  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaamba. – Éd. entièrement refondue. – Paris : Éd. de Minuit, 1963. – 88 p. ; 19 × 10 cm. – (Coll. In-16).
    Quatrième version du texte, définitive ; elle diffère de l’édition de 1958 par l’ajout de quelques corrections, et d’une version abrégée de Zirara en prologue.
  • Le vieillard et l’enfant / François Augiéras (Abdallah Chaamba). – Nouv. éd. – Paris : Éd. de Minuit, 1977. – 88 p. ; 18 × 10 cm.
  • Le vieillard et l’enfant / François Augiéras (Abdallah Chaamba). – Nouv. éd. – Paris : Éd. de Minuit, 1985 (Alençon : Jugain, 15 mars 1985). – 88 p. ; 18 × 10 cm. – ISBN 2-7073-1000-X
    Réimpr. de l’éd. de Paris : Éd. de Minuit, 1977.
  • Le vieillard et l’enfant / Abdallah Chaanba ; [postf. de Pierre Fanlac]. – [Périgueux] : [Pierre Fanlac], [1991] ([Cognac] : Georges Monti, 29 mai 1991). – 80 p. : 1 encart de 2 p. ; 19 × 14 cm. – ISBN 2-86577-151-2
    Reproduction en fac-similé de l’éd. de Périgueux : Pierre Fanlac, 1949. Tirage limité à 1030 ex. sur vélin, dont 30 sur vélin d’Arches.
  • Le voyage des morts / Abdallah Chaamba. – Périgueux : [François Augiéras], 1954-1955 (Périgueux, [juillet 1954-février 1955]). – 17 × 12 cm.
    Éd. pré-originale hors commerce. Impr. sur papiers de couleur. — Récit.
  • Le voyage des morts / Abdallah Chaamba. – Paris : La Nef de Paris Éd., 1959. – 224 p. : photogr. ; 19 × 14 cm. – (Coll. Structure ; 2)
    Revue Structure. Texte définitif.
  • Le voyage des morts / François Augiéras. – [Montpellier] : Fata Morgana, 1979 (Montpellier : Impr. de la Charité, 13 décembre 1979). – 224 p. : couv. ill. ; 23 × 15 cm.
    Reproduction en fac-similé de l’éd. de Paris : La Nef de Paris Éd., 1959. Contient une « Première préface au Voyage des morts ». Tirage limité à 1000 ex. sur vergé.
  • Le voyage des morts / François Augiéras. – Paris : Bernard Grasset, 2000 (Mesnil-sur-l’Estrée : Impr. Firmin-Didot). – 216 p. : couv. ill. ; 19 cm. – (Les cahiers rouges ; 298). ISBN 2-246-58381-0 (br.)
    Réimpr. 2006.
  • « À la recherche des sanctuaires perdus : à propos de l’Athos » / Abdallah Chaamba, in Structure, n° 1, mars 1957. – Périgueux : Structure, 1957 (Carcassonne : Joël Picton).
    Première ébauche du Voyage au Mont Athos, dans laquelle Augiéras note l’intérêt véritablement religieux des moines pour l’homosexualité.
  • « Extrait du “Voyage des morts” » / Abdallah Chaamba, in Structure, n° 2, juin 1957. – Périgueux : Structure, 1957 (Carcassonne : Joël Picton).
  • « La méditation nocturne » / Abdallah Chaamba, in Structure, n° 3, septembre 1957. – Périgueux : Structure, 1957 (Carcassonne : Joël Picton).
  • Zirara / Abdallah Chaamba. – Périgueux : Structure, 1959 (Toulouse : Impr. du Commerce, avril 1958). – 40 p. ; 18 × 13 cm.
    Tirage limité à 200 ex. sur papier de Navarre. — Revue Structure. Sur Le vieillard et l’enfant, et sur les liens de l’auteur avec son oncle.
  • L’apprenti sorcier / [par l’auteur du Vieillard et l’enfant]. – Paris : Julliard, Soc. nouv. Sequana, 1964. – 128 p. : couv. ill. ; 19 × 12 cm. – (Cahiers des Saisons).
    Récit.
  • L’apprenti sorcier / François Augiéras. – [Montpellier] : Éd. Fata Morgana, 1976 (Montpellier : Impr. de la Charité, 13 décembre 1976). – 112 p. ; 22 × 13 cm.
    Récit. Tirage limité à 750 ex. sur vergé ivoire.
  • Une adolescence au temps du Maréchal / François Augiéras. – Bassac : Plein Chant ; Montpellier : Fata Morgana, 1980. – 384 p. ; 19 × 12 cm.
  • La trajectoire : une adolescence au temps du Maréchal / François Augiéras ; [postf. de B. R.]. – [Montpellier] : Fata Morgana (Cognac : Georges Monti, 14 juin 1989). – 384 p. : couv. ill. ; 23 × 15 cm.
    Récit autobiographique. Tirage limité à 1000 ex. sur papier filigrané.
  • Un voyage au Mont Athos : roman / François Augiéras ; [préf. Jean Chalon]. – Paris : Flammarion, 1988 (Mayenne : Impr. Floch, avril 1988). – [2]-VI-288 p. : carte, photogr. ; 20 × 13 cm. – ISBN 2-08-060446-5
    Récit fantastique.
  • Les noces avec l’Occident / François Augiéras ; portr. par Marcel Loth. – [Montpellier] : Éd. Fata Morgana, 1981 (Montpellier : Impr. de la Charité, 13 décembre 1981). – 72 p. : ill. ; 22 × 13 cm.
    Tirage limité à 700 ex. (30 sur vélin Johannot, 670 sur vergé teinté).
  • Domme ou L’essai d’occupation / François Augiéras ; préf. de Jean Chalon. – Montpellier : Fata Morgana, 1982. – 184 p. ; 22 × 14 cm.
    Récit fantastique.
  • Domme ou L’essai d’occupation / François Augiéras ; préf. de Jean Chalon. – Version intégrale. – Monaco : Éd. du Rocher, Jean-Paul Bertrand, 1990 (Châtillon-sous-Bagneux : Impr. S.E.G.). – 208 p. : couv. ill. en coul. ; 20 × 13 cm. – (Coll. Alphée). – ISBN 2-268-00923-8
    Première édition complète.
  • La chasse fantastique / François Augiéras, Paul Placet ; [édité et préfacé par Paul Placet]. – Cubjac : Éd. Phalène, 1984 (Périgueux : Impr. Réjou, décembre 1984). – 64 p. : couv. ill. ; 22 × 14 cm. – (Le théâtre du berger). – ISBN 2-905029-03-X
    Récit fantastique. Tirage limité à 1290 ex., dont 90 numérotés sur papier Rives offset.
  • La chasse fantastique / François Augiéras, Paul Placet ; [avec un avant-propos de Paul Placet]. – Paris : Éd. de La Différence, 2005. – (Minos).
  • Lettres à Paul Placet / François Augiéras. – Fanlac, 2000.
  • Le diable ermite / François Augiéras. – Éd. de la Différence, 2002.

Études sur Augiéras

  • Philippe Berthier, François Augiéras, l’apprenti sorcier, Champ Vallon, 1994.
  • Collectif, François Augiéras ou Le théâtre des esprits, L’Île Verte, 1998.
  • Collectif, Augiéras, une trajectoire rimbaldienne, Au Signe de la Licorne, 1996.
  • Paul Placet, François Augiéras : un barbare en Occident, Fanlac, 1988.
  • « Une aristocratie morale » / Dominique Fernandez, in Europe : revue littéraire mensuelle, 84e année, n° 931-932, novembre-décembre 2006, p. 217-224 (ISSN 0014-2751).
  • Serge Sanchez, François Augiéras, le dernier primitif, Grasset, 2006.
  • Frédérick Tristan, Réfugié de nulle part, Fayard, 2010 (sur Augiéras, p. 109-112).
  • Pierre E. Richard, Bibliographie des écrits de François Augiéras, Nîmes, La Palourde, 2010.
  • Jacques Isolery, « François Augiéras, trajectoire d’une ronce », L’Harmattan, 2011.

Filmographie

  • Luc Lagarde, Pascal Regoli, Julien Regoli, François Augiéras, fragments d’une trajectoire, Bastia, Productions 2001 ApacheFilm & Cie, 1986 (documentaire , 40 mn).
  • Stéphane Sinde, François Augiéras, un essai d’occupation, 2000 (documentaire).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Patrick Bergeron, « François Augiéras », in Nuit blanche, le magazine du livre, n° 108, 2007.
  2. 2,0 et 2,1 « Les papiers de François Augiéras rejoignent la bibliothèque de l’Arsenal », site de la Bibliothèque nationale de France.
  3. Masques, revue des homosexualités, recueil des numéros 12 à 15, 1981.
  4. François Augiéras
  5. 5,0 et 5,1 « Augiéras, une porte sur l’absolu », entretien avec Serge Sanchez, biographe de François Augiéras, in Boojum mag.

Sources