Comité d’action pédérastique révolutionnaire

De BoyWiki

Les affiches d’un Comité d’action pédérastique révolutionnaire (CAPR), collées à la Sorbonne en mai 1968, seraient le déclencheur d’une suite d’événements ayant mené à la constitution d’un groupe rassemblant des féministes du MLF et des lesbiennes venues du groupe Arcadie (Club littéraire et scientifique des pays latins, éditeur de la revue Arcadie), auxquelles s’ajoutent des homosexuels en février 1971. Ce groupe se donnera par la suite le nom de Front homosexuel d’action révolutionnaire (FHAR).[1]

Contexte de l’affiche et du tract

Selon Guy Chevalier, lui et un ami, tous deux alors agrégatifs de lettres modernes, constatant l’ignorance de la question homosexuelle par les mouvements de mai 1968, eurent l’idée de rédiger un tract au nom du C.A.P.R.

Huit affiches furent placardées sur le mur de la Sorbonne par Pierre Hahn et Guy Chevalier, mais elles furent arrachées le lendemain par des militants gauchistes qui estimaient qu’elles salissaient la cause de la Révolution. Le texte fut alors tiré à 500 exemplaires et distribué à l’Odéon et à la Sorbonne.

Signification du mot pédérastie dans le contexte

Un regard rétrospectif hâtif pourrait être trompeur quant au sens accordé au mot pédérastie par les auteurs du tract. Le texte ci-dessous atteste que le mot est pris comme synonyme d’homosexualité au sens large : englobant la pédérastie proprement dite, mais ne s’y limitant pas.

Texte du tract

« Émus et profondément bouleversés par la répression civile et policière qui s’exerce à l’endroit de toutes les minorités érotiques (homosexuels, voyeurs, maso., partouzes), le Comité d’Action Pédérastique Révolutionnaire dénonce la restriction des possibilités amoureuses qui sévit en Occident depuis l’avènement du judéo-christianisme. Les exemples de cette répression odieuse ne manquent pas ; vous les avez sous les yeux à chaque instant ; les inscriptions et les dessins dans les chiottes de la Sorbonne et autres ; les passages à tabac d’homosexuels par la police ou par des civils rétrogrades ; la mise en fiche policière, en général, l’attitude de soumission, les yeux de chiens battus, le genre rase-les-murs de l’homosexuel type ; les carrières brisées, l’isolement et la mise au secret qui sont le lot de toutes les minorités érotiques. Pour un glorieux Jean Genet, cent mille pédérastes honteux, condamnés au malheur.
Le C.A.P.R. lance un appel pour que vous, pédérastes, lesbiennes, etc..., preniez conscience de votre droit à exprimer en toute liberté vos options ou vos particularités amoureuses et à promouvoir par votre exemple une véritable libération sexuelle dont les prétendues majorités sexuelles ont tout autant besoin que nous. […]
(Un homme sur 20 est pd ; sur 4 milliards de la population mondiale, ça fait 200 millions de pd).
NON PAS L’AMOUR ET LA MORT. MAIS L’AMOUR ET LA LIBERTÉ.
»

Mentions

  • Dans son roman-enquête Des Français, Roger Peyrefitte évoque brièvement le Comité, avec un titre incomplet, dans une page sur la révolte étudiante de 1968 :
« Il faisait grâce à l’inscription la plus célèbre de Censier : « Aimez-vous les uns sur les autres. » C’était un écho de la révolution sexuelle. Mais la révolution sexuelle n’était-elle pas accomplie par la facilité des mœurs ? La seule nouveauté avait été le C. P. R., Comité pédérastique révolutionnaire de la Sorbonne.[2] »

Survivance du nom

Quelques mois plus tard, un étudiant savoyard créait au sein du Club littéraire et scientifique des pays latins (qui publiait Arcadie) le premier groupe français véritablement pédérastique, qui prendra le nom de CAPRI.[3] Ce titre n’ayant pas été clairement explicité, il pouvait se référer aussi bien au CAPR de la Sorbonne (avec l’ajout d’un I pour « international ») qu’à l’île évoquée dans L’exilé de Capri de Roger Peyrefitte – l’équivoque étant probablement voulue.

Bibliographie

  • Entretien accordé par Guy Chevalier sous le titre « Le sacerdoce de l’activiste » au magazine Têtu de mars 2001. p. 97-98.
  • Site Kadémos, créé puis supprimé quelques années plus tard par Jacques Girard, et dont les pages ont été sauvegardées par quelques particuliers et quelques institutions.
  • FHAR, Rapport contre la normalité, Paris, Champ Libre (coll. Symptôme, 3), 1971, p. 10.

Notes et références